mardi 10 mai 2011

Des histoires à faire peur

Aupaluk, c’est le seul village du Nunavik construit entièrement par les Inuits, dit la carte postale.

Contrairement aux autres villages, il ne s’est pas construit à l’emplacement d’un ancien poste de traite de la Compagnie de la Baie d’Hudson. Il a d'ailleurs été déplacé. On dit qu'il y avait eu trop de morts violentes, qui avaient fait venir trop de fantômes... Sur l'ancien site, à l’abri du vent, il y a maintenant une mine de fer.

"Rouge comme le fer qui est dans la terre et rouge comme le sang de bêtes" devrait-on écrire.

 
Aupaluk, c'est le village où se sont rassemblés tous les Inuits proscrits des autres communautés. Mais ça, c'est écrit nulle part.

Depuis mon arrivée, j'ai vu ici plus de carcasses que d’animaux vivants. Surtout dans ce frigo communautaire, où chacun peut se servir, y compris les Blancs. L’un des privilèges de ce village.


Il y a quelques semaines encore, les loups rôdaient alentours suivant les troupeaux de caribous. Un ours polaire a été tué la semaine dernière, pas très loin du village. Les restes de l’animal pourrissent à l’air libre, à deux pas de là où je réside. Même les corbeaux n’en veulent plus.

Les prospecteurs miniers sont revenus.
Le village semble brisé comme les vitres de cette salle de classe.


 
Et mes rêves sont gelés dans une sorte d'hyper vigilance. Leurs motifs sont redondants par rapport au quotidien: je rêve d'ours.

 Heureusement qu'il y a la beauté saisissante de la lune de glace et les bernaches qui arrivent avec le redoux…